Léon
Trotsky : Lettre à Alfred Rosmer
[Alfred
et Marguerite Rosmer - Léon Trotsky : Correspondance
1929-1939,
Paris 1982, pp. 167-169,
voir des
annotations
là-bas]
27/VII.
1930
Cher
ami,
Je
n’ai pas voulu vous déranger dans votre asile. Malheureusement j’y
suis forcé par la dernière lettre de N[aville], où il parle de la
lettre de F[rankel] à vous comme d’une partie de tout un système
de « dénigrement » à son égard, d’une information « déloyale
» et « malhonnête ». Il y met en cause M[olinier], Léon et
Fr[ankel].
Or,
vous
devez savoir mieux que personne que j’avais les mêmes idées sur
N[aville] — sur ses côtés excellents comme sur les mauvais — et
sur les dangers qui s’en ouvrent (sic)—
quand il n’y avait aucune question « M[olinier] » et quand je
n’avais même pas soupçonné l’existence de Fr[ankel]. La
meilleure preuve : ma lettre de Janvier à M[olinier].
Je
me suis servi de quelques paroles de Frankel non pour former mon
opinion, mais pour donner à
vous
un nouveau témoignage. C’était de ma part une certaine
indiscrétion à l’égard de Fr[ankel]. Mais le caractère intime
de notre correspondance entre amis a excusé dans mes yeux cette
indiscrétion. Vous avez trouvé bon d’écrire là-dessus à
Fr[ankel]. J’en étais étonné. Fr[ankel] vous a répondu dans un
ton de confiance complète qu’il a envers vous. Maintenant vous
avez trouvé nécessaire d’envoyer la copie de sa lettre à
N[aville].
Dans
mes dernières lettres à vous, j’ai employé à l’égard de
N[aville] des expressions brutales qui dépassent de beaucoup ma
pensée. Je me suis dit : R[osmer] me comprendra ; des exagérations
pareilles dans une lettre entre amis n’expriment que le besoin de
souligner
quelque chose, d’attirer
l’attention d’autrui. Or je suis déjà presque obligé de me
demander si les copies de mes lettres ne sont pas chez N[aville]. Je
n’ai rien à lui cacher. S’il se donne la peine d’y réfléchir,
il comprendra ce que signifie telle ou telle expression brutale.
Mais, tout de même, je devrai être plus prudent dans l’avenir
dans mes lettres" amicales, avec des allégations personnelles,
et des expressions énergiques.
Je
vous prie de ne pas prendre trop au tragique tout cela comme je ne le
fais pas moi-même. Je veux seulement arrêter un processus qui
s’embrouille. Je suis déjà forcé de cacher la lettre de
N[aville] aux yeux de Léon et de Fr[ankel] (qui est mon
secrétaire)...
Je
crois qu’on devrait passer à l’ordre du jour.
Mes
meilleurs saluts pour vous et pour M[arguerite].
Tout
à vous comme toujours
L.
T.