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Léon Trotsky 19380921 Extraits d’une Interview avec les Représentants de la Presse sud-américaine

Léon Trotsky : Extraits d’une Interview avec les Représentants

de la Presse sud-américaine

(21 septembre 1938)

[Source Léon Trotsky, Œuvres 19, octobre 1938 a décembre 1938. Institut Léon Trotsky, Paris 1985, pp. 282 f., voir des annotations là-bas]

En politique, le plus important, et le plus difficile à mon sens, c’est de définir, d’une part, les données générales qui déterminent la vie et le combat de tous les pays du monde contemporain, et d’autre part de mettre à jour la combinaison particulière de ces lois dans chaque pays pris séparément. L’humanité d'aujourd’hui vit tout entière, sans exception, depuis les ouvriers britanniques jusqu’aux nomades d’Abyssinie, sous le joug de l’impérialisme II ne faut jamais oublier cela. Mais cela ne signifie pas du tout que l’impérialisme a le même visage dans tous les pays. Non, certains pays sont les champions de l’impérialisme, et d’autres en sont les victimes. Voilà, véritablement, la ligne de partage des eaux entre les nations et États contemporains. C’est de ce point de vue, et de ce point de vue seulement, qu’il faut examiner en particulier, la question si actuelle du fascisme et de la démocratie.

La démocratie, pour le Mexique par exemple, signifie l’aspiration d’un pays semi-colonial à briser ses liens de dépendance, donner la terre aux paysans, amener les Indiens à un niveau culturel plus élevé, etc. Autrement dit, les tâches démocratiques du Mexique ont un caractère progressiste et révolutionnaire. Mais que signifie la « démocratie » en Grande-Bretagne? La préservation de l’état de choses existant, c’est-à-dire avant tout, la préservation de la domination de la métropole sur les colonies. Il en va de même pour la France. Sous le drapeau de la démocratie, se cache ici la domination de la minorité privilégiée sur la majorité opprimée.

Pour être précis, on ne peut non plus parler du « fascisme en général ». En Allemagne, en Italie, au Japon, le fascisme et le militarisme sont les armes d’un impérialisme déconfit et famélique, donc agressif. Dans les pays latino-américains, le fascisme est l’expression même de leur situation de dépendance, d’esclaves de l’impérialisme étranger. Il faut être capable de déceler, sous la forme politique, le contenu économique et social.

Dans les pays d’Amérique latine, la meilleure méthode, la plus sûre pour lutter contre le fascisme, c’est la révolution agraire. C’est uniquement parce que le Mexique a fait des pas sérieux dans cette voie, que le soulèvement du général Cedillo est resté sans écho. Au contraire, l’écrasement féroce des républicains en Espagne s’explique uniquement par le fait que le gouvernement Azana, en accord avec Staline, y a réprimé la révolution agraire et le mouvement indépendant des travailleurs. Une politique sociale conservatrice, ou plus encore : réactionnaire, dans les pays faibles et semi-coloniaux représente, à proprement parler, une trahison de l’indépendance nationale.

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