Léon
Trotsky : Lettre à Herbert Solow
(5
février 1938)
[Source
Léon Trotsky, Œuvres 16, janvier 1938 – mars 1938. Institut Léon
Trotsky, Paris 1983, pp. 144-145,
titre :
« Commentaire sur un article », voir des
annotations là-bas]
Cher
Camarade Solow,
Un
excellent article. Ce serait bien s'il pouvait paraître dans une
revue américaine, mais pouvez-vous en trouver une qui soit prête à
le publier ? Quelques remarques secondaires :
1)
Le sous-titre est très intelligent, mais pas expliqué dans le
texte.
2)
Walter Krivitsky n’est pas un « agent industriel ». C’est l’un
des plus importants des agents du Kremlin en général.
3)
A la page 3, vous dites : « S’il pensait qu’il était avisé que
Trotsky soit tué hors de Russie... A ce moment, Staline se
contentait d'essayer de susciter une haine mondiale contre Trotsky. »
Ce n'est pas juste. Nous avons maintenant par des sources de première
main connaissance d’attentats préparés par
le
G.P.U. en France et en Norvège contre moi et nous disposons ici à
Mexico de faits extrêmement importants. Je doute qu’il soit avisé
d’en parler dans votre article. Mais votre présentation de cette
question est entièrement fausse. Staline a pensé que c’était «
avisé », mais il n’a pas encore réussi à présent, grâce
seulement à notre propre « stratégie », c’est-à-dire avant
tout grâce à la vigilance de nombreux communistes pendant ces dix
années.
4)
Page 19, vous dites à propos de Tarov : « Via
l’Afghanistan et l’Inde, comme au temps du tsarisme. En fait, ce
fut par la Perse et l’Inde ». Aux temps du tsarisme, c’était
mille fois plus facile de s’évader que maintenant. Aucun d’entre
nous n’a choisi via
Perse et Inde. Nous préférions la frontière occidentale.
Un
excellent article ! Il me semble que vous pourriez le placer plus
facilement si vous donniez moins de raisons de soupçonner que vous
sympathisez (plus ou moins) avec l’affaire trotskyste. Ce serait
mieux d’effacer mon nom chaque fois qu’il apparaît, mais
peut-être ces remarques viennent-elles trop tard.
P.-S.
Vous m’avez promis il y a quelques années d’écrire une thèse
sur la question juive. Maintenant la question devient infiniment plus
aiguë qu’il y a deux ans. Il faut répondre à cette question et
seuls la IVe
Internationale et ses « amis » peuvent donner la réponse, parce
qu’ils ne sont pas liés à la démocratie britannique, au
sionisme, à la démocratie américaine ou la bureaucratie soviétique
avec son Birobidjan. J’inclus un extrait, sur cette question, d’une
lettre à un ami.